Le crayon de papier, crayon de bois ou crayon graphite, quelle que soit son appellation en France, est l’outil de dessin et d’écriture le plus simple et le plus banal de notre environnement quotidien.
Il est présent partout, dans nos brouillons, nos notes et dans notre cas précis, dans nos dessins. Je dirais même que le crayon de papier est la base de nos dessins sur papier.
Vous allez découvrir que pour en arriver à sa forme de cylindre hexagonal en bois enfermant la mine, le crayon de papier a fait du chemin (géographique!) depuis sa forme primitive. Ensuite, je vous amènerai à découvrir les différentes marques de crayons de papier destiné à la pratique du dessin.
L’histoire du crayon de papier moderne à travers les âges et ses fabricants
Le crayon de papier et le site de Keswick dans le Cumberland en Angleterre
L’histoire du crayon de papier comme nous le connaissons nous amène au milieu du XVIe siècle en Angleterre. Nous sommes dans le Nord-Ouest de l’Angleterre. La légende veut qu’un violent orage se soit abattu sur un vieux chêne à Borrowdale, près de la ville de Keswick. En se déracinant, ce vieux chêne met à jour un gisement de minerai noir et luisant. Les locaux découvrent d’autres gisements de ce même minerai dans le canton.
Comme il ressemble très fortement au plomb, on appelle ce minerai très friable la plombalgine. Buffon le nomme aussi molybdène. A vrai dire, au XVIe siècle, on ne parvenait vraiment à identifier la nature de ce minerai mais on a vite compris son utilité. Les bergers enveloppaient d’une ficelle un bout de plombalgine et marquaient leur bétail avec.
Petit à petit, les habitants de Keswick se mettent à extraire la plombalgine, la débitent en feuilles puis en bâtonnets pour écrire avec.
La popularité de la plombalgine anglaise s’étend si rapidement à travers l’Europe que sa valeur grimpe à des sommets astronomiques. On surveille l’entrée des mines, les convois de minerai sont protégés, on déclare des saisons d’extraction extrêmement restreintes. Le minerai est interdit à la vente à l’étranger sauf si c’est pour le vendre sous forme de crayon.
Pour empêcher les éventuels pilleurs de mine, on inonde les galeries hors saison. Les manufactures de crayons commencent à fleurir en Angleterre avec une exclusivité totale d’exploitation.
Conrad Gesner: l’inventeur du premier crayon ou portemine
Conrad Gesner est né à Zurich en Suisse en 1516. Durant sa vie relativement brève, il se révèle être un prodige de la science dans tous les domaines: médecine, botanique, zoologie, minéralogie, pharmacie, philosophie et linguistique. Il s’intéresse absolument à tout, grimpe dans les Alpes pour y étudier la faune et la flore avec une grande passion. Il est l’un des pères fondateurs de la paléontologie en se penchant sur les fossiles.
Dans son ouvrage De rerum fossilum publié en 1565, il y décrit comme fossile tout artefact naturel retrouvé dans la terre. C’est précisément dans cet ouvrage qu’il parle de la plombalgine anglaise et de ses propriétés fabuleuses d’écriture. Il conçoit même le dessin d’un prototype de crayon à mine ou portemine (voir dessin ci-dessus). Son idée était si juste que 450 ans plus, un artisan allemand décide de lui donner enfin le jour en l’appelant Der Gessner. En effet, Gesner décède de la peste l’année de la publication de cet ouvrage et ne trouvera jamais le temps de développer son idée.
Au passage, j’ai ce crayon et j’avoue qu’il est élégant et agréable. C’est un portemine simple tout en bois. Il est très léger à tenir. La conception est fidèle à celle de Gessner.
2. Nüremberg, la capitale européenne du crayon
On peut s’interroger sur les raisons qui ont fait de la ville allemande Nüremberg (Nürnberg) la cité européenne du crayon du XVIIIe siècle jusqu’à nos jours. C’est d’ailleurs l’une de mes premières questions: Pourquoi trouve-t-on dans la même ville Faber-Castell, Staedtler, Lyra et Schwan-Stabilo?
Nüremberg, cité médiévale importante, a connu un réel essor économique à partir du XVe siècle. Par les conquêtes politiques, Nüremberg se trouve à un carrefour important des échanges entre l’Europe et l’Orient et les affaires vont bon train pour cette ville de marchands. Albrecht Dürer, le célèbre peintre de la Renaissance allemande, y est né et y a vécu.